Votre entrée dans l’hôpital est assez agréable. Les portes sont automatiques et tout est adapté aux déplacements en fauteuil roulant. Les couloirs et les ascenseurs sont larges, des rampes permettent de contourner les marches, et une signalisation au sol s’avère très pratique pour vous indiquer le chemin de la Plateforme mouvement et handicap. En arrivant à l’accueil de la plateforme, vous notez la présence de nombreux documents de sensibilisation, bon pour plus tard ! Autant utiliser le temps dont vous disposez pour vous renseigner.
Un homme avec une étrange moustache vous accueille depuis son bureau de secrétariat. Levant les yeux de son ordinateur, il s’adresse directement à vous :
« Nouvellement en fauteuil, c’est ça ?
– Euh, oui, répondez-vous du tac au tac tout en songeant que vous ne faites pas encore illusion et que vous devrez vous habituer encore à ce siège si peu maniable.
– J’imagine que vous venez pour obtenir des informations ? Les urgences vous laissent vraiment sortir sans rien ! On avait essayé de développer un axe d’accompagnement dans le passé, mais pour des raisons budgétaires nous n’avons jamais pu le mettre en place…
– C’est dommage effectivement, c’est vrai que le choc est rude lorsqu’il faut s’habituer à ça sans aide extérieure. Enfin pour moi, ce n’est que temporaire, alors je me dis que c’est juste un mauvais moment à passer.
– Justement, dans ce cadre, nous pouvons vous proposer un accompagnement avec un examen de motricité de vos membres inférieurs.
– Alors à la base, je venais juste pour avoir des informations.
– Oui, bien sûr. Mais ce que je peux vous proposer c’est d’en apprendre davantage sur vous et vos capacités du moment. C’est avant tout en ayant des informations sur vous que vous aurez des informations sur le handicap. »
C’est la première fois qu’une personne s’adressant à vous verbalise le terme de handicap. Vous le ressentez à la fois comme un poids et un soulagement. Ce n’est que lorsque votre interlocuteur recule afin de sortir du secrétariat que vous remarquez qu’il est lui aussi en fauteuil roulant. Le suivant dans les couloirs, vous tentez de suivre le rythme tout en ayant l’impression de participer à une course effrénée. Ce n’est qu’alors que vous vous rendez compte de l’étendue des progrès vous restant à accomplir en matière de déplacements.
Lorsque vous arrivez dans la salle de consultation, le médecin vous informe que l’évaluation de votre mobilité nécessite de parcourir, en vous levant, une distance de dix mètres. Dès lors, vous appréhendez grandement l’idée de vous lever. Depuis que votre immobilisation a été ordonnée par le médecin, vous n’avez jamais songé à vous lever pour essayer de marcher. Vous ignorez complètement si vos jambes vous répondront un tant soit peu. Au moins, vous ne ressentez aucune douleur grâce à votre traitement antalgique.
La vue de la piste de marche vous rassure. Deux glissières sont disposées sur les côtés afin de vous permettre de vous y tenir. Ce dispositif vous évitera probablement une bonne chute. Un médecin grisonnant s’approche de vous. Il a belle allure et vous intimide un peu avec son costume deux pièces bleu. Il vous salue en vous expliquant que des marqueurs seront positionnés sur votre peau afin d’enregistrer vos déplacements.
Par la suite, tout s’est passé très vite et il est possible que vous ne gardiez pas un souvenir clair de chacun des éléments. En fait à l’instant même où vous avez essayé de vous dresser sur vos jambes, une intense nausée s’est emparée de vous tandis que votre vision se troublait. Heureusement, après quelques essais, vous avez pu demeurer en station verticale sans davantage de peine. Les quelques pas que vous avez enchaînés étaient très probablement misérables d’autant plus que d’intenses fourmillements vous parcouraient le corps. Cependant, vous songez qu’il s’agissait d’un mal pour un bien puisque les résultats vous seront envoyés après analyse et vous permettront de faire des choix favorables à votre rétablissement.
De retour dans la rue, vous choisissez un itinéraire différent du trajet aller en essayant de favoriser les trottoirs vous semblant les plus commodes. Finissant par vous balader un peu au hasard, vous arrivez devant la Halte de nuit. Quel hasard ! On se croirait presque dans un mauvais roman. L’entrée est juste devant vous. Souhaitez-vous découvrir ce dispositif ?